Chronique du chanoine
Notice sur Issac du chanoine Brugière- (Société Historique et Archéologique du Périgord)
Document numérisé par Pierre Besse pour la SHAP (fonds Pommarède)
Hippolyte Brugière né le 26/06/1821 à Chalagnac est décédé le4/05/1922 à La Madeleine à Bergerac. Ordonné prêtre en 1856 il fut nommé curé de Coulounieix de 1864 à 1895. Infatigable, l’abbé Brugière devait presque chaque jour, après avoir fait son catéchisme et visité ses malades, descendre de son presbytère à Périgueux pour consulter les vieux registres poudreux conservés dans toutes les archives ( les archives départementales, la bibliothèque, la mairie, le greffe du tribunal etc …) pour ses travaux de recherche. Entre 1884 et 1892, il remplit 419 feuilles de 12 pages chacune soit, en tout ,5028 pages, écrit en caractères menus mais bien lisibles
ISSAC
Cette commune est située sur un sol très inégal traversé d’Est en Ouest par le vallon de la Crempse. Elle est arrosée par plusieurs ruisseaux ; la Crempse, la Crempsoulie, le Pouyou (ou de l’Espinasse) etc… Il y a un grand nombre de fontaines parmi lesquelles on peut citer celles de Villamblardou, de La Garenne, de Marou, de Bontemps, de Ladou, de Giraudie, de Lalande, du Vignaud, de Roussou etc..Les bois sont en général médiocres, le terrain qu’occupent ces bois ou taillis est sablonneux ; les terres sont d’assez bonnes qualités; il y a des carrières de pierre de taille mais gélive, des moellons, bons pour les bâtisses. On récolte du blé, du maïs, des châtaignes, des pommes de terre etc…
Les prés sont aquatiques ; les émanations des eaux stagnantes qui s’échappent de la Crempse retenues par les moulins et les usines occasionnent des fièvres intermittentes qui altèrent bien souvent la santé des habitants. Il serait vivement à désirer qu’on assainit au moyen de drainage cette belle vallée qui de malsaine et peu productive pourrait devenir saine et fertile.
La population est aisée et assez religieuse ; la paroisse, qui est très étendue, est par conséquent difficile à desservir.
Origines : « Yssacum »(Pouillé* XIII siècle) « Eychacum » (1342), « Yssac » (1365), « Yschat » (Pouillé 1382), « Eyssac »(XVI siècle) « Ayssac », « Eysat », «Issac »etc… passim**
Collateur : l’évêque***.
(ndlr : *pouillé : inventaire, état des bénéfices ecclésiastiques d’une cure, d’une abbaye, d’un diocèse etc…
**passim : en de nombreux autres passages d’une œuvre citée ou d’un livre.
*** collateur : celui qui conférait un bénéfice ecclésiastique)
Eglise d’Issac: Titulaire et patron : Saint Avit, ,ermite 17 juin (registre paroisse de 1668 et suiv. aux archives départementales et pouillé vers 1780)
L’église se compose d’une nef avec 2 chapelles latérales. Son style est roman- byzantin./ Au transept est une coupole petite mais élevée, l’abside semi-circulaire est munie d’une série d’arcades à plein cintre séparées par des colonnes que surmontent des chapiteaux d’une grande simplicité. La voute de la nef est lambrissée. Sur la façade méridionale et contigüe au chœur, il y a une chapelle de la renaissance appelée »la chapelle du château (de Montréal). Elle communique avec la nef par une arcade surbaissée. Sur cette façade on voit les restes d’un ancien portail à plein cintre au dessus duquel se trouve une statuette sculptée qu’on croit représenter Saint Avit, le patron de la paroisse. L’autre portail est orné de moulures ogivales. On voit encore sur les murs de l’église la (litre ?) seigneuriale.
Il ya une tribune. Sacristie au Nord des croisées. Tableau de l’Annonciation obtenu de l(Etat en 1874. 3 jolis autels. Beaux reliquaires (2 ?). On expose les reliques de Sainte Radegonde le dimanche qui suit le 13 août. Autels de la Vierge et de Saint Joseph avec statues.
Cloche de 1800 livres, portant cette inscription :
« Eglise de St Avit d’Issac. Parrain Romain George de Faubournet de Montferrand. Marraine : Madame Desmoulins de Leybardie née de Baillet. Curé Jean-Baptiste Mignot Garnerie Lajarthe. Maire : Joseph Lacoste. 1851. Antonin Vauthier. Fecit. Foi. Espérance .Charité (sic) »
Bas reliefs : Jésus en croix, un abbé(ou Saint Avit) montrant le ciel. Cette cloche a été fondue dans la cour du maire.
Sur une poutre au dessus de la voute de l’église on lit sur une seule ligne l’inscription suivante :
« P.MARSAL 01 –D-P + M.MAZEAV.TI.RAYVNDIE+TERRADE.1602 »
L’église est enterrée de plus d’un mètre.
Cimetière à 250 mètres.
Presbytère neuf à 150 mètres. 9 pièces avec dépendances ; jardin de 57 m sur 35 m avec d’autres terres.
(Archives de la Dordogne. Q 550 n° 68 et Q 75 n° 74)
« Vente du 21 prairial an IV : bâtiments, jardins etc..situés commune d’Issac et Saint Médard de Mussidan, propriétaires presbytères d’Issac et St Médard. Adjudicataires Pierre Piotay pour 15 483 frs . Payé 7000 frs. L’acquéreur s’est laissé déchoir et la somme de 7000 frs lui a été remboursée le 23 fructidor an IV »
Deux écoles- trois cabarets – un café – deux mendiants et trois enfants assistés.
Rentes de 250 frs pour les malheureux distribués par le bureau de bienfaisance.
La Sainte Epine (ndlr :trouvée sur le général anglais Talbot, après son décès à la bataille de Castillon en 1453 et gardée depuis dans la chapelle du château de Montréal) n’est pas le seul objet qui rappelle le souvenir de Talbot dans la commune. Un village porte le nom de Talabot (Talbot). Près de là fut livré un combat sanglant ^près lequel les anglais taillés en pièces se réfugièrent dans la forêt voisine qu’on appelle encore la forêt Talbot.
On dit qu’il y avait autrefois une chapelle dans la partie Nord du bourg appelée « les Baravis ( ?) »
-Chapelle privée à Maziéras ou aucun office n’a lieu.
-A l’est du bourg est l’ancien château de Lamothe communiquant par un souterrain avec un autre vieux château ou se rendait la justice, dans le bourg.
–Château de Maupas habité par une famille de cultivateurs ; on prétend qu’il y avait là une abbaye. A la Sandané, à 1500 m du bourg est une ancienne maison qu’on dit bâtie au XIII siècle par les anglais ; on ajoute qu’ils avaient établi une fabrique d’acier à la Serrerie (ou aciérerie).
-Sur le penchant d’un coteau à 3 km environ au sud, était situé un ancien château appelé le « Château de Labattut »
Ce lieu est aujourd’hui sauvage occupé par de mauvais taillis enchevêtrés de ronces et d’épines à travers les quels il est difficile de pénétrer. On y découvre encore des fonds de murailles de sa double enceinte. On dit que sous le château, il y a un souterrain qui aboutit à un endroit nommé « le Lac des Chevaliers ». Cet ancien lac qui est sans eau appartenait ainsi que le château aux chevaliers de Malte, c’est du moins la tradition.
-Le nom du village voisin est sans rapport avec l’aspect sauvage de ces lieux ; on l’appelle « Malaroumey ».
-Près du village de Gaparre, on voit un reste de dolmen en grès dont la pierre principale est percée d’un trou avec une rigole qui servaient, disent les gens, à faciliter à nos pères l’écoulement du sang de leurs victimes.
-A 1500 m environ au sud, près de la route, o, voit une pierre ayant l’apparence d’un âne mort qu’on appelle « la pierre säumo ». En patois ce mot signifie bourrique et l’on croit que c’est l’image de quelque divinité païenne.
Il existe près du village de Maison Neuve (où ?) une grotte appelée « Le trou du Renard » . Il y a dans cette grotte des stalactites à 15 mètres de profondeur, mais il y a aussi un puits dan lequel tomba un visiteur qui y aurait péri si des voisins inquiets de son absence prolongée n’étaient venu l’en tirer, mais le corps meurtri.
On cite encore au nord d’Issac près du village de Marou, la « grotte de Pécoure » qui paraît se prolonger fort loin. La
tradition rapporte que dans cette sombre retraite vivait autrefois le nommé Vire-Fumade, assez habile pour fondre les cailloux et en extraire de l’or et de l’argent. On ajoute que cet homme poursuivi par la justice jusque dans son repaire, alla se réfugier dans une autre grotte de la commune de Villamblard. Découvert, il fut tiré de là, conduit dans un cachot et enfin au gibet.
On connait une autre grotte située près de la fontaine de La Roche ; on la dit assez curieuse.
Les Lackens. Du côté de Labattut, il y a des dépressions de terrain en entonnoir assez singuliers que l’on nomme le lacken ou les lackens. Ils ne sont pas éloignés de ceux de Beleymas dont nous avons donné la description et qui sont à peu de différence près semblables.
« Extrait de la notice du chanoine Brugière sur Beleymas
Les lackens : pas loin de là, dans la forêt de Lagudal sur un versant se trouvent deux cavités circulaires désignés dans le pays sous le nom de « Les lackens ». Nous avons traversé le plus grand dont la circonférence peut avoir de 80 à 100 mètres. Sur les bords une mousse délicate et des lichens aux teintes les plus variées émergeaient d’une eau claire et limpide ; bientôt nos pieds disparurent dans des touffes de gazon et nous éprouvâmes le même saisissement qu’une femme craintive éprouve lorsqu’elle se voit dans une frêle barque sur les eaux ; cette grande masse de terre est une espèce d’ilot mouvant. L’autre lacken éloigné d’environ vingt mètres est moitié grandeur du premier et situé un peu au dessous. On rapporte qu’en 1893 plusieurs habitants entreprirent l’épuisement du grand lacken en faisant passer l’eau par le petit lacken. Ils firent à cet effet une tranchée entre les deux mais lorsqu’ont et creusé assez profondément pour l’écoulement, l’eau du premier lacken descendit en soubresauts disparaissant avec un tel fracas au fond du petit lacken que les travailleurs saisis d’épouvante prirent tous la fuite »
Dans le bourg, en déblayant un terrain pour bâtir la maison de Mr Pouyadou, on a trouvé un puits renfermant des ossements humains avec un grand couteau de cuisine. Devant une autre maison du bourg appartenant à Mr Lachaud, serrurier aussi des ossements humains, dans une citerne appelée « Le Sabory ».
A la révolution, on brula sur la place publique d’Issac un très grand nombre de livres, de registres et de papiers divers. Ceux qui se trouvaient au château de Montréal furent portés au district de Mussidan et servirent pour la plupart à bourrer des canons.
Superstition : on croit que les feux follets sont les âmes des petits enfants morts sans bapême. On croit aux revenants et aux sorciers ; on a recours à la devine pour une chose volée ou perdue.. Une pie qui traverse en volant le chemin que l’on suit est un présage de malheur. Une tâche noirâtre produite par une contusion est l’indice d’une facheuse nouvelle ; c’est aussi la preuve que les âmes en peine dans le purgatoire demandent des prières.